Mon mari est obsédé. Par nos poissons.
Et par leur imminente mort.
Depuis un an. Il attend qu'ils meurent d'un jour à l'autre, depuis un an.
Ce sont les poissons de ma fille, devrais-je dire. Ce sont des télescopes, noirs avec de longues nageoires, Roxy et Kiki (comment elle fait pour les différencier demeure un mystère). Elle les a désirés, elle les a choisis et elle doit s'en occuper, en l'occurrence les nourrir et changer leur eau habitable.
Ils meurent à chaque jour. Et ils ressuscitent à chaque jour. Tous les jours, on les voit soit l'un ou les deux la tête en bas dans le fond de leur bol, presque immobiles, les nageoires flasques bercées par le mouvement de l'eau, apparemment sans vie. Et mon mari de dire: "Frédérique, tes poissons (ton poisson) sont (est) en train de mourir". Et ma fille de répondre: "Papa! Arrrrrêêêêêête! Tu dis toujours ça!".
J'en suis venu à anticiper avec irritation le moment où mon mari va regarder le bol des poissons, et faire son diagnostic du jour. Je ne suis plus capable de l'entendre dire: "Ah! Y'en a un de mort!" ou "Eille! Y'en a un qui nage!" ou "Wow, les deux ont l'air vivant". Je n'en peux plus.
Et ça me porte à réfléchir que nos poissons, bêtes sans grand cerveau ni capable d'avoir un jugement critique (ou du moins croyons-nous) vivent de la même manière que les humains en général.
Je m'explique. Ces pauvres poissons ne vivent pas toujours dans un environnement sain, l'eau n'étant pas changée régulièrement. Comme des gens qui vont travailler dans des environnements qui ne sont pas tout à fait sains pour eux. On change leur eau pour les aider, comme toutes les mises-à-jour et améliorations de la technologie pour les humains. Or, nous les humains avons de la difficulté à gérer ces changements. Eh bien, nos poissons aussi. Leur eau fraîche ne contient plus autant de leurs bactéries et ils ont de la difficulté à s'adapter, d'où leur apparente inertie. Les poissons ne se comportent pas selon nos attentes. Les humains non plus. Ils n'ont pas toujours faim. Qui n'a pas un jour dit: "Oh, je vais seulement manger un muffin pour dîner, je n'ai pas faim". Malgré l'expression manger comme un poisson rouge souvent utilisée par les humains, les poissons non plus n'ont pas toujours faim. Je me tue donc à dire à mon charmant mari que même si les poissons ne mangent pas tout de suite quand notre fille les nourrit, ça ne veut certainement pas dire qu'ils vont mourir pendant la nuit!
Les poissons aussi ont le droit et sont proie à être bousculés dans la vie, à être déprimés, d'en avoir assez de leurs petites roches toujours la même couleur dans le fond de leur bol, toujours le même maudit petit "arbre" orange à une piasse comme déco, l'écoeurite de la même bouffe, matin et soir, day in, day out, same old, same old. C'est long un an dans la vie d'un poisson!!!
Un jour, ces poissons vont mourir de leur belle mort, leur espérance de vie n'étant pas très longue. Et ce jour-là, mon mari va crier en triomphant: "Je vous l'avais dit qu'ils mourraient cette nuit !!". Et moi de lever les yeux au ciel.
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